Énoncé de position solidaire avec les intervenant.e.s de l’Accueil Bonneau
Dernière mise à jour : 27 janv. 2021

En tant qu’infirmières nous nous opposons à la décision de l’administration de l'Accueil Bonneau de mettre à pied sans avertissement une dizaine d’intervenant.e.s sociaux.ales syndiqué.e.s à la FSSS-CSN. Nous sommes solidaires de leur lutte pour regagner leurs emplois et faire reconnaître la valeur du travail essentiel prodigué par les intervenant.e.s de première ligne. La mise-à-pied soudaine nuit à la continuité des soins en empêchant le transfert et la continuité des suivis. En pleine crise, il nous semble dangereux d’éliminer des postes d’intervenant.e.s alors que les besoins sont en augmentation constante. Chez cette population vulnérable, avec qui il est difficile de créer un lien de confiance, un bris de service peut avoir des conséquences lourdes. Remplacer ce service social par des agents de sécurité de la firme privée Garda nous semble une menace à la qualité des soins et services prodigués à l'Accueil Bonneau.
L'itinérance est un phénomène complexe de désaffiliation sociale. Des gardiens de sécurité d’une firme privée n’ont ni la formation ni la responsabilité de jouer le rôle d'intervenant.e.s sociaux.ales.
Les mises-à-pied des intervenant.e.s et l’embauche de gardiens risquent de stigmatiser et de marginaliser davantage une population déjà ultra-précarisée par le manque d’accessibilité au réseau de la santé et des services sociaux.
Nous sommes fort inquiètes de voir augmenter l’utilisation de la police ou d’agents de sécurité en réponse à des problèmes sociaux. L’évacuation du campement Notre-Dame en décembre 2020, l’imposition actuelle du couvre-feu sans amnistie pour les personnes itinérantes et le remplacement d’intervenant.e.s par des agents de sécurité sont des exemples de cette logique de répression.
Nous sommes d’avis que les actions doivent viser les déterminants sociaux de la santé et l’amélioration des conditions de vie des gens. D’autant plus aujourd’hui, nous sommes en pleine crise de la santé mentale. Les besoins de la population québécoise grandissent à une vitesse alarmante depuis le début de cette crise, qui précipite bon nombre de Québécois.es dans la précarité.
Il est impératif d’investir davantage pour améliorer le filet social si on souhaite se protéger des crises ou, du moins, s’en sortir. Il est essentiel de reconnaître et de valoriser le travail des personnes qui œuvrent dans les organismes communautaires partout au Québec, personnes qui sont majoritairement des femmes. En temps de crise, nous avons besoin d’un filet social plus fort, pas d’une augmentation de la police et des agents de sécurité. Nous avons besoin de solutions structurantes, systémiques et durables. La résilience et la sécurité de nos communautés en dépendent.
Comme infirmières nous sommes préoccupées des conséquences graves de ce type de décision sur les personnes en situation d’itinérance. En tant que soignantes, nous savons l’importance de l’entraide, de l’écoute, du répit et de la sollicitude. Instaurer une ambiance de répression dans les rues tout comme dans les services d’urgence en itinérance en y favorisant la surveillance au détriment des services professionnels adaptés, ce n’est pas prendre soin, c’est aggraver la crise.
Conséquemment nous recommandons:
- de cesser la judiciarisation des personnes en situation d'itinérance, notamment en instaurant une amnistie au couvre-feu pour ces personnes
- de financer les services communautaires à la hauteur des besoins
- de ré-embaucher immédiatement les intervenant.e.s mis-à-pieds
- de s'assurer de fournir de l'équipement de protection individuelle et les ressources nécessaires pour que les organismes communautaires puissent continuer à prodiguer des services dans le respect des mesures sanitaires
-d’investir dans des solutions structurantes, systémiques et durables en collaboration avec les acteurs sur le terrain
Association Québécoise des Infirmières et Infirmiers (AQII-QNA)
Syndicat des travailleuses et travailleurs en intervention communautaire (STTIC-CSN)
Mathilde Laforge, intervenante licenciée de l’Accueil Bonneau
Chloé Bourbiaux, intervenante depuis 5 ans à l’Accueil Bonneau dont le poste a été aboli
Elizabeth Tessier, intervenante à contrat pour le grand quai, dont le poste a été aboli
Liliane Cyiza, intervenante à l'Accueil Bonneau dont le poste a été aboli
Arianna Ambler, intervenante à contrat pour le grand quai, dont le poste a été aboli
Kim Racicot, intervenante licenciée de l’Accueil Bonneau
Caroline Lelotte, intervenante à l’Accueil Bonneau dont le poste a été aboli
Véronique Séguin, infirmière et membre IWW
Eve-Lyne Clusiault, infirmière clinicienne
Mélanie Chagnon, infirmière clinicienne
Sébastien Roy, infirmier clinicien en réduction des méfaits
Esther Carielus, infirmière clinicienne
Julien Déry, éducateur spécialisé à la Commission scolaire de Montréal
David Galipeau, intervenant en toxicomanie
Maude Huot-Locas, Intervenante psychosociale
Marion Larose, doctorante en psychoéducation, UdeM
Raphaëlle Théorêt, étudiante à la maîtrise en psychoéducation
Marc-André Bélanger, coordonnateur du développement des pratiques, Regroupement des Auberges du coeur du Québec (RACQ)
Simon Roy, formateur en alphabétisation populaire.